lundi 9 septembre 2019

Graffiti, Je te tague, tu me tagues , on se tague

 




Je viens de faire un tour dans le Verdanson pour voir s’il y avait du nouveau. J’ai constaté que certaines fresques réalisées mi-août dans le cadre de la manifestation trente ans de graffiti à Montpellier ont été taguées. Certaines ont eu droit à de gros lettrages très couvrants, au nom de crew assez répandus à Montpellier, d’autres à de simples phrases écrites à la bombe ou des mots désagréables à l’égard des organisateurs qui auraient par élitisme oublié d’inviter les graffeurs Montpellierains. Certains ont simplement tagués leur nom, souvent à de multiples reprises.

Le taguage d'oeuvres de street art n'est pas propre à cette manifestation et au Verdanson on le retrouve partout, y compris dans le vieux Montpellier sur des collages ou des pochoirs qui ne relèvent pas de la culture graffiti. 

Dans le Verdanson on remarque que certaines fresques ont été épargnées. Il ne s'agit certainement pas d'un hasard. Il semble  que les artistes appartenant à des crew proches de ceux qui ont tagué aient été épargnés. Quelqu'un qui n'est pas du milieu graffiti n'est pas en mesure de saisir dans leur subtilité les relations de proximité ou d'hostilité entre crew et entre graffeurs.

Je ne publie généralement pas de photos d’oeuvres abîmées ou taguées par respect pour leur auteur et pour ne pas donner aux tagueurs le visibilité qu'ils recherchent en parasitant des œuvres en place.  Dans le Verdanson j’ai eu tellement de plaisir à voir les artistes s’appliquer pendant des heures dans la chaleur torride de journées d’août caniculaires que ça me fait mal pour eux de voir leurs fresques aussi rapidement dégradées par des personnes issues comme eux du milieu graffiti.

Les graffeurs se réclament d’un code de bonne conduite qui voudrait que l’oeuvre d’un artiste expérimenté, reconnu et respecté par ses pairs, soit, un temps au moins, préservée et que, si un jour il faut faire de la place à d’autres artistes, elle soit totalement recouverte.

Le milieu graffiti est un milieu susceptible assez replié sur son code et sa culture de crew. Il n’apprécie guère que des personnes étrangères au milieu parlent d’un sujet que, bien sur, ils ne connaissent pas, portent des jugements esthétiques, s'approprient des terminologies  réservées à eux seuls.et enfin jugent leurs agissements à la lumière d'un prétendu code de bonne conduite dont ils ignorent tout. En un mot ils ne supportent pas que que des curieux et des pleureuses se mêlent de ce qui ne les regarde pas.

C’est en toute connaissance de cause mais avec prudence et modestie que j’aborde le sujet du toyage par d'autres graffeurs de fresques de graffeurs ou  plus généralement d’oeuvres picturales de toutes nature posées dans l’espace urbain.

Je ne parle pas du vandalisme ordinaire commis par  des passants que leur médiocrité pousse à détruire ou endommager des oeuvres juste par bêtise ou méchanceté.

J’ai du mal à la comprendre les motivations qui poussent un graffeur à abîmer l’oeuvre d’un autre graffeur.

Le fait que des tagueurs s’en prennent à des graffeurs qui sont issus de la même famille artistique qu’eux et sont quasiment tous passés par une période vandale, ne peut qu’interroger. Il est triste de voir des fresques, volontairement dégradées. Ces toyages hostiles peuvent être perçus comme une petite guerre fratricide, ou les bombes, heureusement ne sont que de peinture.

Pourquoi des tagueurs qui agissent dans l’illégalité en posant des graffitis, sur des murs privés, des toits, des ponts,  ou des trains, s’en prennent-t-ils aussi au travail de graffeurs issus du même mouvement qu’eux ?

-Par éthique ? Un graffeur reconnu par le milieu de l’art, les institutions, et le grand public n’appartiendrait plus au milieu graffiti qui serait par définition vandale et le code d’honneur ne s’appliquerait plus à eux.

-Par dépit ? On détruit une oeuvre que l’on considère comme étant d’un niveau artistique auquel jamais on ne pourra accéder.

-Par jalousie ? On abîme ou on détruit l’oeuvre d’un artiste ayant acquis une notoriété et une reconnaissance au delà du milieu du graffiti, dont le travail figure en galerie et dont les interventions urbaines sont rémunérées.

- par xénophobie ?  On ne respecte pas un collègue issu d’un autre quartier, d’une autre ville ou d’un autre pays. Certains phrases lues dans le Verdanson qui stigmatisent des artistes parce qu'ils ne sont pas Montpellierains, laissent penser à un triste penchant identitaire de certains graffeurs qui semblent tomber dans le pire de l’air du temps.

-Par opportunisme ? Il s’agirait de profiter de la proximité avec l’oeuvre d’un artiste ayant une certaine notoriété pour figurer sur toutes les photos prises par des amateurs et publiées sur instagram ou d’autres réseaux sociaux. Des tags ou des flops sont posés à coté d’un collage ou d’un pochoir, ou dessus, sans la défigurer vraiment.

- Par plaisir ? Il s’agirait du syndrome tardif de ceux qui prenaient plaisir, enfants, à arracher les ailes des mouches.

Quel qu'en soit  le motif, taguer sans délai, ou presque, les œuvres de collègues  est un comportement plutôt médiocre.

Tout ceci n'est cependant que mesquines querelles sans importance. Notre planète connaît des problèmes bien plus graves. L’art réalisé et visible dans la rue est par définition éphémère et les oeuvres aujourd’hui vivent une vie virtuelle bien plus longue que leur vie réelle grâce à la photo et aux réseaux sociaux. 

Le graffiti n’échappe pas aux mauvais penchants des hommes. Dès qu’il y a une équipe, un crew, un gang, un territoire, il y a des rivalités. Dès que certains réussissent d’autres les punissent. 

Les graffeurs sont en général, plutôt détachés quant au devenir de leurs fresques. Le plaisir pour eux est consommé à partir du moment ou ils ont posé leur blaze. Ils ne s’attachent pas à leur oeuvre. Quelques photos, un peu de suivi de notoriété sur Instagram et l'oeuvre a déjà rempli sa mission. 
.
Une fois une œuvre achevée ils ont déjà en tête la suivante. Les amateurs de street art sont plus choqués par le toyage des fresques que les artistes eux-même.  Notre éducation et notre fréquentation des musées nous ont habitué à sacraliser les œuvres d'art.  Le public se lamente plus que les artistes qui eux connaissent la dure loi de la rue.


Le toy qu'elles qu'en soit les motivations fait partie intégrante du Graffiti parce que le graffiti est à l'école de la rue, qui est une école rude. Tous les graffeurs, même ceux qui jouissent d'une renommée internationale connaissent et acceptent, dès qu'ils interviennent dans la rue, de n'être pas sacralisés. Tout le monde est à égalité dans la rue et c'est sans doute ce message que les tagueurs de fresques veulent rappeler d'une manière certe peu élégante, mais il n'y a pas mort d'homme.

Les photos ont été prises dans le Verdanson et dans le vieux Montpellier. 


Ca ne se passe pas qu'à Montpellier. Toulouse. Street-art : une fresque géante réalisée pour le festival Rose Béton dégradée.
https://actu.fr/occitanie/toulouse_31555/toulouse-street-art-fresque-geante-realisee-festival-rose-beton-degradee_27148663.html






























mercredi 21 août 2019

Street art.En ville ouvrez les yeux vous êtes dans un musée

Mr Voul, Saint Pierre, Culkeen



Street art. En ville ouvrez les yeux vous êtes dans un musée.

Le street art ne se limite pas au mouvement graffiti. Le qualificatif de street art n’est pas une manière moins subversive de parler du graffiti. Le street art dit bien ce qu’il est «de l’art dans la rue», qu’il s’agisse d’espace public, privé, autorisé ou illégal, à partir du moment ou une œuvre est offerte gratuitement à tous les regards il s’agit de street art. Le graffiti en est une branche.

La plupart des graffeurs, lettreurs, fresquistes ont commencé par le tag, en posant là ou ils sont certains d’être vu des flops vandales. La question ne se pose pas de savoir si c’est de l’art ou pas, si c’est beau ou pas. C’est de l’art et c’est beau ! même si ça ne plaît pas,, parce que, soit disant ça salit.

Posez vous trois questions. Est-ce que vous doutez du caractère artistique d’une calligraphie taoïste exécutée en un éclair ? Est-ce que l’espace urbain est si beau qu’on doive à tout prix se priver d’écrire dessus ? Est-ce que les publicités qui l’envahissent sont belles et artistiquement intéressantes ? Trois fois non.

Cependant je ne reprocherai à quiconque de lutter contre, de poursuivre les tagueurs, et d’effacer leurs «cochonneries». Les tagueurs vandalisent, les policiers les poursuivent, les mairies et les propriétaires privés jouent du Karcher et repeignent. Chacun est dans sont rôle.

Il n’est pas contradictoire de voir dans le tag son caractère artistique, parce que le geste l'est et qu’il a engendré une la scène graffiti qui occupe aujourd’hui une place importante dans l’art contemporain et en même temps assumer son caractère illégal donc répréhensible.

Toute oeuvre dans la rue, même grandiose, même géniale est éphémère parce qu’elle est fille du tag et a gardé une part de son caractère sulfureux. S’y ajoute, bien sur, la rue avec les malveillants, les jaloux, les frustrés qui décollent et saccagent par plaisir malsain. Et puis il y a la pluie, le vent le soleil et le temps qui passe qui également contribuent à l’usure et à la destruction.

La rue n’est pas seulement ouverte aux graffeurs. Je ne pense pas que Ernest Pignon Ernest, considéré à juste titre, comme un précurseur du street art, soit un ancien tagueur. Il est difficile de rien affirmer concernant le mystérieux Banksy, mais il ne semble pas que le pochoir comme les collages soient issus du graffiti.

Les artistes de rue dont je souhaite parler ont un parcours inverse à celui des graffeurs. Alors que les graffeurs ont commencé dans la rue et finissent pour certains en atelier et exposent en galerie, eux sont illustrateurs, graphistes, peintre ou sculpteur en atelier. Ils n’ont pas l’esprit vandales ils choisissent la rue pour être vus du plus grand nombre et si possible reconnus. Organiser une exposition en galerie n’est pas toujours facile et ne touche qu’un public limité.
De plus en plus d’artistes issus de différentes filières d’art graphique ou d’écoles des beaux arts, profitent des espaces intimistes des coeurs de ville, peu propices aux grandes fresques pour donner à voir librement leurs créations.

Ces univers artistiques sont souvent bien aboutis et l’amateur éclairé sait les identifier à leur style. Les modes d’expression sont multiples presque illimités : des pochoirs, des collages élaborés avec toute sortes de techniques, de la mosaïque, des faïences, du modelage ou des découpages de divers matériaux et même des BMX

Les oeuvres étant souvent de petite taille elles aiment à s’afficher en grappes sur un même mur. Les artistes se connaissent, s’accueillent de ville en ville et organisent des sessions de collage amicales et festives. L’intérêt est aussi que les oeuvres en groupe ont plus de lisibilité, En plus le voisinage d’artistes à forte notoriété tel Invader ou Oré attire les amateurs et surtout les photographes qui vont les publier sur Instagram.

Les passants en ville sont souvent indifférents voire aveugles aux oeuvres qu’il voient sans les regarder. Il existe cependant de plus en plus d’amateurs éclairés qui connaissent et «chassent» les oeuvres. Il y a également des visites guidées street art, organisées par les offices de tourisme ou des associations. Ce public averti fait le lien avec les réseaux sociaux et en particulier Instagram qui permet de diffuser les images et de tisser un réseau, national et même international de folowers.  

Si les artistes sont aussi attentifs à l’emplacement de leurs oeuvres et à leur voisinage avec d’autres artistes, s’ils transforment leurs sessions collage en événements c’est pour booster leur présence sur Instagram et pour certains d’entre eux faire connaître leur boutique en ligne, leurs expositions et les événements auxquels ils participent.

Pour augmenter leur notoriété ces artistes deviennent nomades. Ils vont s’afficher de villes en villes dans tout le pays et même au delà. Ils établissent des collaborations et tissent des réseaux. Ils sont attendus par des amateurs de plus en plus nombreux, dont je suis bien sur, et qui recherchent leurs oeuvres et développent une culture et une connaissance de cette branche du street art.


Grâce à tous ces artistes les coeurs de nos villes et même au delà deviennent des musées à ciel ouvert. Des musées éphémères soumis aux destructions, y compris par les brigades des villes préposées aux tags, aux intempéries et à l’usure, mais des musées toujours renouvelés et riche en découvertes.

Merci à eux qui transforment nos villes en chasse aux trésors et donnent à voir de la beauté à ceux qui savent regarder.

21 août 2019*


Jace

Monsieur BMX sert de support à des skate board cassés
Sanko  (lèvres)  et Orco (écureuil)


Une cox de Oups

Sailor


Loco


Zek
Big Ben

Baudugo

Noon

Ose


Djeko, Mara


artiste non identifié
Sunra

Mifamosa, Invader, le rang d'honneur, inconnu

Crying Sailor

Oups



Cukeen, crying sailor, Botero pop

Cole et Crying Sailor


Le Rang d'honneur


Crying Saolor, Botero Pop



Culkeen, Imagine§co


Débit de Beau et inconnus



Jace

Orco

Matrioch cake

Whoups

Reine Aneda


Orco



Matrioch Cake, Botero Pop, Mymuseis

Invader, le rang d'honneur

mardi 20 août 2019

Graffiti "Soit on garde tout, soit on efface tout..." (Mode 2)

Texte intégré par Mode 2 à sa fresque dans le Verdanson




Il n’a pas fallu une semaine pour que des fresques réalisées dans le Verdanson par des artistes de grande notoriété venus de France entière mais aussi de Montpellier soient recouvertes d’inscriptions et de noms de crew en lettrages sommaires.
Le monde du graffiti a ses règles mais traîne aussi des rancunes tenaces. Ce monde est difficilement pénétrable par qui n’y appartient pas. Le néophyte intéressé par le graffiti peut cependant s’interroger sur ce qui pousse certains tagueurs ou graffeurs, pas forcément les plus médiocres d’ailleurs, à saccager le travail de ceux qui, par leur talent, ont acquis une certaine notoriété.

Le graffiti interroge la notion de beau. Il est enfant du tag et le tag n'a pas vocation à être beau mais à inscrire dans l'espace public, autorisé ou non, l'identité de son auteur. 
Le tag dit juste "regardez c'est moi !" mais pas "regardez c'est beau,!". La beauté d'un tag vient d'un geste calligraphique rapide comme l'éclair. Ce geste spontané qu'est le flop, évolue chez certains vers le graf, la lettre, la fresque qui offrent des beautés plus conventionnelles. 

Le public aime la beauté quand elle n'est pas subversive.  Cette  beauté se vend et l'artiste peut y gagner la reconnaissance et en vivre.
A un moment donné coexistent des graffeurs- tagueurs qui revendiquent une pureté vendable et contestataire et des graffeurs, lettreurs fresquiste qui ont souvent débuté vandales, mais qui ont évolué dans le choix de leurs supports ajoutant la toile aux murs des villes. Ils sont en quelque sorte rentrés dans le système. 

Ils appartiennent tous au même univers artistique et ce n'est pas la notion de beau ou de laid qui les sépare. Le laid n'existe pas dans une expression artistique. Ce qui les sépare c'est que l'un est resté sauvage, ou plutôt dans l'illégalité, le terme est moins connoté,  et l'autre est entré dans la légalité, certains diraient le système. L'un revendique la pureté et accuse l'autre de compromission avec la société et l'argent. 
Le toyage des fresques est une affaire de famille. Ce n'est finalement pas très grave parce que, s'il est une notion sur laquelle tout le monde s'accorde, c'est le caractère éphémère de l'art urbain. Les artistes urbains sont mus par le plaisir de faire, pas celui de durer.

Allez y, défoulez vous, joyeux tagueurs, les murs appartiennent à ceux qui les prennent et le talent n’est pas seulement une affaire de reconnaissance.

20 août 2019

Toy sur Alexone-Dizac et Bault

Inscription sur BomK

Inscriptions sur Difuz

fr
Fresque non taguée de Mode 2 (partie)