Et
aujourd'hui alors … « Soyons heureux(ses) en attendant
le bonheur » Cette interpellation de la graphiste Miss Tic
correspondait tellement à mon état d'esprit du moment que j'en ai
tiré le fil d'une réflexion tortueuse et d'une introspection
narcissique que je livre sous forme de bilan annuel de mes années
retraite.
Il
y a tout juste un an, brossant le bilan de ma première année de
retraite j'écrivais « Je vais bien ». Je peux encore le
dire. La pratique régulière du Qigong et du Taïchi, mais aussi de
la marche, y sont sans doute pour beaucoup. L'art et à la culture,
expositions, festivals, lecture et toujours peinture occupent une
grande place dans mon quotidien. Je poursuis, quoique plus
modérément, des activités associatives de bénévolat. J'ai
rencontré de belles personnes, généreuses et amicales avec
lesquelles je partage à la fois des pôles d'intérêts et des
activités de toutes sortes.
Ma
philosophie de vie est d'une simplicité absolue. Aimer la vie, aimer
les autres, m'aimer moi-même, rester en éveil, être gourmand de
culture, d'activités physiques, de nature, de bonne chère ; le
tout dans le respect des valeurs qui sont les miennes : authenticité,
simplicité, franchise, bienveillance.
Les
conceptions orientales qui sous-tendent la pratique du taïchi et des
activités connexes que sont les exercices de santé taoïstes, le
qigong et la méditation, m'aident sur le plan physique et mental à
progresser vers le lâcher prise, dont intuitivement je ressentais la
nécessité, une vie plus spontanée, construite au jour le jour,
autour d'instants heureux pleinement appréciés. Cette manière de
vivre, loin d'être insouciante, est au contraire bien moins
sécurisée et confortable qu'une vie établie dans un cadre
relationnel durable, celui du couple et de la famille en particulier.
Ceux
qui me connaissent savent qu'il y a une part de moi qui agit et une
autre qui observe et interroge. Ce double, de nature plutôt
inquiète, m'interdit l'insouciance et la légèreté. Je vais lui
donner la parole.
2015,
une année comme ci comme ça
La
confiance en l'avenir a pris du plomb dans l'aile.
Le
changement climatique n'est plus contesté que par une poignée
d'incurables ignorants. Il est porteur de la menace de phénomènes
naturels destructeurs mais aussi d'une difficulté grandissante à
assurer l'alimentation et les ressources en eau de la population .
Des troubles sociaux, de la violence et des migrations massives
seront une des conséquences de ce changement.
La
domination de territoires immenses au Moyen Orient par des individus
fanatisés, qui assouvissent leurs fantasmes de tous ordres dans un
cauchemar régressif qui condamne les femmes à la soumission et le
reste de l'humanité à la mort, a engendré une vague de migrations
sans précédent, qui déferle sur une Europe désemparée.
Ce
monstre qui fascine les individus les plus médiocres de nos sociétés
a provoqué l'irruption d'une nouvelle forme de terrorisme. La France
a été frappée à deux reprises, le 11 janvier avec les attentats
ciblés contre Charlie Hebdo et la communauté juive, le 13 novembre,
avec des attentats aveugles en plein Paris.
Le
changement climatique, les migrations, le terrorisme ne constituent
pas seulement la toile de fond d'une année qui ne serait ni plus ni
moins tragique que les autres, ils ont compromis notre confiance en
l'avenir et instillé une peur latente de ce que risquent de subir
nos enfants et bien plus encore nos petits enfants.
Le
moi dont je vais parler, dans sa quête de bonheur et
d'épanouissement, s'inscrit donc dans ce contexte angoissant, mais
comme le colibri cher à Pierre Rabhi, je compte bien faire ma part.
Mon
premier voyage de l'année commencera le 24 décembre. Je vais
retrouver Agnès à la Nouvelle Orléan pour passer avec elle noël
et le jour de l'an. Elle n'est pas rentrée en France cette année.
Un séjour commun dans une ville à découvrir, nous a semblé être
une belle manière de nous retrouver.
En
janvier un projet de séjour au Sénégal pour aller rencontrer Nils,
mon dernier petit fils, a été brusquement stoppé par un problème
de santé dont les premiers symptômes se sont déclarés vers
ses trois mois. Il a du, de toute urgence, venir à Montpellier pour
consulter des médecins. J'espère que la difficile première
année de vie de Nils serra vite oubliée. Je mentirais si je disais
que cet épisode ne m'a pas affecté.
J'allais
cliquer sur la touche de réservation des billets d'avion pour
Nouméa, quand Elsa m'a annoncé la venue de toute la famille à
Montpellier . Le séjour a eu lieu au mois de juin. Ce fut pour moi
une période d'harmonie et de bonheur. J'ai profité autant que faire
se peut d'Amaury, déjà grand et attachant garçon, et du piège à
amour qu'est Cassy. Le contre coup de leur départ a été un peu
rude.
Être
plutôt que faire
Même
pour un retraité les premiers jours de septembre s'apparentent une
véritable rentrée. C'est le moment de renouveler les activités.
Comment adapter le fameux cocktail d'activités, mis au point au jour
de mon départ à la retraite et qui était sensé donner du sens à
ma vie. Je me suis rendu compte que la question des ingrédients, de
leur qualité et de leur dosage, renvoyait à s'interroger sur les
valeurs et les envies. La question était moins qu'est ce que je vais
faire, que, qu'est ce que je veux être ? La notion de
sens renvoie au faire, la notion d'être plutôt aux valeurs.
Je
n'avais pas voulu aborder la retraite comme un vide à remplir pour
éviter l’écueil du « faire à tout pris », en
m’efforçant de donner du sens à mes activités, plutôt que de
m'étourdir d'un emploi du temps sur-booké. Cette approche m'a
conduit à doser : du temps pour les autres, sous forme de bénévolat,
du temps pour moi sous forme de sport et de culture, tout en restant
sobre. La notion de sobriété heureuse me convient parfaitement.
Je
continuerai à m'en tenir à cette ligne de conduite qui me permet
d'être en accord avec mes valeurs et de garder ma liberté.
Cependant, dans ce catalogue d'intentions, j'oubliais de m'interroger
sur ce que je voulais être.
Est-ce
que celui que je suis est bien celui que je voudrais être ?
Suis-je satisfait de ma vie ? Quelles perspectives s'ouvrent à
moi ?
Seul
…
La
solitude n'est pas forcément une malédiction. Je vis dans un
confortable petit appartement. Mes trois enfants ont choisi de vivre
loin, très loin même.
Montpellier
est une ville dynamique, offrant milles opportunités. J'ai
suffisamment de ressources, physiques, mentales et financières, pour
mettre à profit tout ce qui permet d'être heureux. Je ne veux en
aucun cas faire peser sur mes enfants le fardeau moral d'un père
malheureux. Il fut une époque ou le malheur était seyant, ma mère
s'y est complu, c'était une autre époque.
Deux
mots de la place d'internet et des réseaux sociaux. Contrairement à
une idée reçue qui les accuse de virtualiser la vie, en offrant
gratuitement des outils de communication permettant de se voir,
parler, concrétiser des projets, échanger des idées, ils
dynamisent la vie réelle d'une manière qui était inimaginable il y
a quelques année..
Skype
est une application qui permet de supporter l'éloignement des
enfants et petits enfants. Une visio-communication gratuite que l'on
peut faire durer sans limite c'est quand même magique.
Les
messageries et les boîtes mail permettent d'engager de petites
conversations, simples signes de vie, ou de longs échanges n'ayant
pour limite que le sommeil qui gagne. Je n'imagine même pas ce que
serait ma vie sans les SMS illimités.
Facebook
est extraordinaire pour créer du lien, mais d'un maniement délicat.
ce réseau social demande soit beaucoup de détachement, soit
beaucoup de précautions, car il peut s'avérer source d'embrouilles.
J'ai abandonné facebook parce qu'il n'était pas vraiment
nécessaire, et parce que j'étais démuni devant le flot de
d'images, de coups de cœur et d'idées partagées. Liker, ne pas
liker, montrer de l'intérêt ou de l'indifférence...trop de
dilemmes. Je prenais ça trop à cœur. Cet instrument est tellement
puissant que, à l'évidence il génère un nouveau mode de vie. Il y
a bien une génération facebook, je n'en fait plus partie.
C'est
grâce au site « on va sortir» que j'ai commencé et pris goût
à la marche nordique. J'ai rencontré de fort belles personnes qui
comptent aujourd'hui parmi mes amies les plus chère. C'est par OVS
aussi que j'ai trouvé l'école de taïchi dans laquelle je pratique.
Avec
internet nous disposons d'outils commodes et puissants qui, bien
utilisés, contribuent largement à l'organisation quotidienne mais
surtout au lien social et amical.
La
solitude est un état d'esprit plus qu'une fatalité. J'ai depuis
quelques temps partagé tant de moments heureux avec des personnes
qui à l'évidence avaient autant de plaisir à être avec moi que moi
avec elles que je rechigne de plus en plus à être et faire seul. Et
pourtant je dors seul, je vais encore au cinéma seul, je vais me
balader seul, Parce que j'applique ma règle N°1 : il vaut
mieux faire quelque chose seul que ne rien faire du tout.
Seul...Mais libre
Seul...Mais libre
Le
choix de la liberté n'est pas le plus confortable, ni le plus
facile. A l'évidence je suis dans le refus affirmé de revivre
en couple. Je ne sens, ni le courage, ni même l'envie de partager ma
vie avec une femme. Le couple à mon age ne serait pas le support
d'une vie à construire, mais juste le gage d'une sorte de sécurité,
ne pas être seul, ne pas vieillir seul, ne pas mourir seul. Dans ma
balance personnelle la liberté pèse plus que la sécurité.
Sécurité d'ailleurs toute illusoire. Quelle que soit la situation,
l'impermanence est la règle alors autant s'y soumettre.
Le
couple est un modèle, une référence sociale. Celui ou celle qui,
quel que soit son age ou son sexe et quelles qu'en soit les raisons,
divorce, rupture, veuvage, ou autre, ne s'y conforme fait l'objet
d'incessantes injonctions sociales ou familiales, toujours agaçantes,
souvent humiliantes. Vivre seul n'est pas toujours un choix. Rares
sont les hommes ou les femmes qui font le choix d'un modèle de vie
différent, même après des expériences de couple cuisantes qui
auraient pu les échauder.
Si
la vie de couple s'était prolongée, mon existence, se réduirait
certainement à gratter sans fin mon jardin, réparer à droite à
gauche tout ce qui dysfonctionnerait dans une maison trop grande. Je
vivrais dans l'ennui, la frustration et l'amertume.
Le
divorce que je n'ai pas voulu, m'a évité de finir ma vie dans un
marécage de compromis, de concessions et de frustrations. Malgré ou
grâce à la liberté que me donne le fait d'être seul, je suis sans
doute plus épanoui que si j'étais resté dans l'illusion
protectrice du couple.
L'avantage
et la difficulté de la liberté c'est que l'on en fait ce que l'on
veut. Elle suppose cependant des aptitudes. Elle met en jeu l'être tout entier. Le corps et l'esprit.
Malgré
le soin que l'on prend d'elle, la Santé n'est pas garantie, elle est
pourtant la condition absolue de l'action donc de la joie. Je ne
redoute rien de plus que de la perdre. Comme la vie est bien faite,
la santé passe par le sport. La gymnastique, (taoïste pour moi) le
qigong, le taïchi, le sport (Vélo, marche, marche nordique,
activités de plein air diverses) sont source de plaisir, de lien
social, et mêmes d'amitiés. Un cercle vertueux donc.
L'exercice
de la liberté se pratique selon des aspirations et des valeurs mais
surtout des intentions et de la volonté. Qualités et défauts,
fondent une manière de vivre et d'être au quotidien.
Libre
à quel prix ?
Profiter
du meilleur de ce qu'offre la vie, dans l'instant n'est pas un credo,
un prêt à porter existentiel, dont chacun devrait savoir profiter.
Pour ce qui me concerne cette aspiration est le résultat du
renoncement à la vie à laquelle je croyais et d'une reconstruction. Je voudrais approfondir les ressorts et l'authenticité
des choix. Font-ils de moi un homme heureux et confiant dans
l'avenir ?
Cela
peut paraître incongru, mais après la rupture brutale qu'est un
divorce, la condition pour redémarrer est de faire le deuil de la
vie passée. Pour moi le deuil est passé par l'oubli. J'ai perdu la
notion du temps, ma vie s'est aplatie, je suis incapable de situer
des événements récents dans le temps...un an ? Deux ans ?
Trois ? Le fil d'une vie que je croyais écrite d'avance s'est
rompu. Ce fut ma manière de renoncer à une vie échouée tout en
préservant sans affect les souvenirs nécessaires à la
communication avec mes enfants, qui ont besoin pour se construire.
Construire
une famille apparaît, à juste titre, comme le meilleur moyen de
donner du sens à la vie. Il n'est pas étonnant qu'elle
représente
la norme du bonheur dans notre société. Comment
se construire en
solo ?
Rares
sont les vieux couples qui dégagent une impression d'amour et de
joie. Chacun en côtoie. Ils restent collés entre eux par'une intimité
faite de rancœurs, de mal être et d’acrimonies réciproques. A
trop croire à la permanence des sentiments et du confort, à trop
chercher la sécurité, de nombreux couples s'enferment dans un huis
clos mortifère.
La
valorisation du présent est le résultat d'un renoncement. Lorsque
le passé est renié et que la confiance en des projets d'avenir est
gravement atteinte, eh bien il ne reste que le présent. C'est
pourquoi la notion de sens à laquelle je me réfère, se comprend
moins comme une direction à suivre que comme une combinaison de
valeurs.
La
capacité à être pleinement présents à l'environnement naturel et
aux personnes qui nous entourent n'est pas innée, mais véritablement
une qualité qui se cultive. Être heureux n'est pas dans l'ordre des
choses.
Si
la vie prive de nombreuses personnes, de tous ages, de la possibilité
ou de l'envie de famille elle ne les voue pas pour autant aux affres
de la solitude. Bien au contraire elle ouvre le champ des possibles.
La sécurité est une illusion, l'impermanence la règle.
Amour,
bienveillance et ouverture ne seraient-ils pas les clés du bonheur.
Il n'est possible d'être heureux que dans le partage. La vie est
une aventure qui se construit au quotidien, elle est faite des
opportunités que l'on se donne et des valeurs qui sous-tendent
chacune de nos actions.
Sans
m'en rendre vraiment compte je suis passé d'une recherche du sens
qui s'apprécie dans la durée à la recherche de l'instant heureux.
Revenir
à l'essentiel
J'ai
longtemps pensé que l'on ne change jamais, qu'il ne suffit pas de se
proclamer différent et, bien sur meilleur, pour l'être. Aujourd'hui
pourtant je suis convaincu que pour cette nouvelle étape de ma vie,
si différente des précédentes, il faut que je m'adapte. Je ne dois
pas changer par lubie, parce que je ne m'aime pas ou que l'on ne
m'aime pas, je dois devenir un nouvel homme pour faire face à une
situation nouvelle, mettre en pratique un modèle personnel pour
vieillir le mieux possible physiquement et moralement.
Comme
une plante s'adapte au froid, à la chaleur ou à la sécheresse en
s'inclinant en produisant de feuilles plus petites ou grandes, en
renonçant à fleurir, il est nécessaire que je m'adapte à
mon nouveau
biotope existentiel,
que je devienne, en quelque sorte l'homme de la situation.
Cet
homme nouveau il est impératif que je l'aime et qu'on l'aime donc
qu'il
soit meilleur que l'ancien et, pourquoi pas, plus heureux.
Je
n'imagine pas qu'un catalogue de bonnes intentions fasse l'affaire.
« Je serai moins ceci, plus cela, je ne ferai plus comme ci,
mais comme ça ». Pour changer il faut s'écouter, être
présent à soit même, laisser s'exprimer celui qui de tout temps
est resté tapis au fond de soi, mais que l'on a enfoui.
Le
changement auquel j'aspire est possible, facile même, parce qu'il ne
s'agit pas d'un défi de plus pour devenir un sur-homme, au contraire
c'est lâcher prise, abandonner ses tensions, reprendre possession de
son corps, s'abandonner aux plaisirs simples comme respirer, écouter,
retrouver des sensations, se faire confiance, faire confiance, être
bienveillant affectueux accepter d'être aimé.
Changer
est le processus qui par étape permet de passer de la tension au
relâchement, du stress à l'apaisement, de la tristesse à la joie.
Les manières de penser orientales sont, plus que nos conceptions
occidentales aptes à exprimer les processus qui à la fois
permettent de devenir meilleur et plus heureux. C'est dans des
pratiques énergétiques orientales que j'ai trouvé à la fois les
ressources et les recettes de cette transformation. Tout ceci est en
fait très simple, il s'agit de se dépouiller de toutes les couches
de préjugés, de fausses obligations et de tensions qui font écran
entre nous et la réalité pour retrouver un état de disponibilité
aux autres et au monde et la capacité à s'émerveiller.
Abandonner
les dépouilles de héro actif, forcément stressé et agressif pour
devenir une personne apaisée ouverte et réceptive. Le stress et les
tensions s'impriment dans le corps ou ils prennent la forme de toutes
sortes de douleurs, d'insomnies et mêmes de pathologies sérieuses.
Les exercices de santé taoïstes et le qigong, les respirations, la
méditation contribuent à faire retrouver de la souplesse, à
éliminer les tensions, à faire circuler et harmoniser l'énergie.
Le
changement personnel dont je parle, n'est donc pas une démarche
purement intellectuelle, il part du corps. Il va au-delà du « une
âme saine dans un corps sain » mais relève du même principe.
Plus on se sent bien dans son corps, plus on se sent bien dans sa
vie. Tous les adjectifs qui s'appliquent au corps s'appliquent aussi
à l'esprit : fort, souple, ouvert, et à contrario, faible,
raide, fermé. De même reconnaître la supériorité du ying sur le
yang, pour éviter de répondre à une agression par une agression
supérieure, trouve sa traduction évidente dans la conduite à
tenir face aux vacheries que nous
réserve la vie mais et dont nul n'est responsable.
C'est
bien d'une démarche dont je parle, la mise en œuvre, pour partie
contrainte, pour partie volontaire d'une manière nouvelle de vivre,
plus accueillante et plus disponible qui donne la primauté au
présent.
Accepter
l'insécurité
Encore
faut-il que le présent ait du contenu. Tous les moments ne portent
pas le même potentiel d'intensité et de joie. De l'enfance à l'âge
adulte la plus grande partie du temps est contrainte par les
activités nécessaires pour assurer l'éducation et la subsistance ;
École, travail, tâches ménagères, déplacements. Cette partie du
temps est en général vécue comme contraignante et plutôt porteuse
de d'inquiétudes de fatigue et de stress.
La
retraite rend une grande partie du temps. Ce temps libéré fait peur
parce qu'il peut être porteur de solitude et d'ennui. C'est ici que
je veux en venir. La liberté ouvre toutes les opportunités, mais
elle ne résout rien. Être libre et vivre dans le présent
nécessite, pour faire vivre des amitiés et en créer de nouvelles,
de la volonté et la capacité quotidienne à aller vers les autres
et saisir toutes les opportunités. Il est possible de multiplier les
moments de joie intense et de partage à condition d'avoir l'énergie,
la vitalité joyeuse et l'envie nécessaire.
Finie
la vie sécurisée tournée vers un avenir tout tracé, place à une
vie en action, au jour le jour, presque, brouillonne parce que
opportuniste et souvent inattendue, mais le plus souvent heureuse.
Par
ces lignes je souhaite témoigner ma reconnaissance à l'égard de
celles et ceux avec qui je partage depuis quelques mois des moments
de vie et des activités sportives, culturelles ou simplement des
verres, des repas ou des conversations. Je n'aurais jamais cru, du
temps de ma vie "casée", avoir la chance inouïe de les
connaître, de partager des moments aussi intenses dont j'ai le
sentiment d'avoir profité pleinement. En un mot je suis certain que
globalement la rupture m'a permis d'explorer des territoires heureux
que je n'aurais pas connu, je n'aurais jamais rencontré et côtoyé
les belles personnes qui me font l'immense plaisir de leur affection.
En
affirmant ma liberté j'accepte totalement et j'assume la réalité
de l'impermanence. Pour ce faire je privilégie le moment présent,
j'accepte d’être simplement heureux, ce qui se comprend dans
l'instant. Je ne recherche pas forcément le bonheur qui se comprend
dans la durée. Petit sacrifice, car ne croyant pas à la permanence,
je ne crois ni à la sécurité ni au bonheur éternel. J'accepte
l'alternance de moments heureux, de moments ni ni , ni heureux, ni
malheureux. J'accepte même les moments d'inquiétude ou d'angoisse.
En
quelque sorte l'angoisse est corollaire de la liberté. Peur que des
problèmes de santé, une baisse de vitalité, la perte de l'envie,
de la capacité à rester dans l'action, de pratiquer des activités
physiques, d'aller vers les autres et de présenter un visage avenant
ne vienne brutalement interrompre la capacité d'agir. Choisir la
liberté c'est choisir l'insécurité ou tout au moins avoir la
conscience que la vie n'est pas écrite d'avance. Qu'elle peut
réserver d'énormes vacheries et qu'elle ne sourit qu'à ceux qui
ont la force morale et physique de se renouveler.
Pour
conclure
Je
me rapproche d'Epictète. Ce philosophe complète mes références
hétéroclites qui vont de Mis Tic, aux philosophies orientales, en
passant par Pierre Rabhi.
« Si
tu as pris un rôle qui dépassait tes forces, tout à la fois tu
l'as mal tenu, et celui que tu pouvais remplir, tu l'as laissé
passer. » Pour Epictète en effet, tout nous est prêté, y
compris notre corps seules nous appartiennent nos intentions. Inutile
de nous épuiser à vouloir avoir prise sur des éléments qui nous
dépassent. Quoique l'on fasse nous n'avons aucune prise sur le
destin. La mort d'un proche, un accident et bien d'autres événements
qui dépassent notre volonté, peuvent à tout moment bouleverser les
vies les mieux organisée. Du deuil à la résilience nous nous
sommes dotés des moyens de surmonter, au mieux, les coups du destin.
La sécurité n'existe pas.
Epictète
distingue donc la vie et l'usage de la vie. La vie nous est prêtée,
seules nos intentions, c'est à dire l'usage que l'on fait de la vie
nous appartient. Il sépare donc la vie, qui ne nous appartient pas
et relève du destin, de la simple jouissance qui relève de la
liberté. La sagesse est donc de ne pas franchir la ligne de crête
qui sépare ce qui est à notre portée de ce qui ne l'est pas, en
n'ayant que des désirs réalisables. Vivre au présent permet
d'éviter de croire que l'on peut maîtriser son destin. Oui je sais
c'est très in-sécurisant et même frustrant parce que la liberté
est limitée par la capacité de choix.
C'est
sur ces considérations philosophiques que je termine cette
introspection. Il m'a paru nécessaire d'ordonner toutes les
interrogations qui me trotent dans la tête. Merci à tous ceux et
surtout toutes celles, parce qu'elles sont plus nombreuses, et oui
c'est comme ça, qui me font l'amitié de partager des
improvisations, des esquisses de vie tellement intenses. Merci à mes
enfants et petits enfants qui me témoignent avec constance un amour
qui booste mon énergie et mon envie de vivre et d'être heureux.
Amis,
famille, je suis heureux par vous, je suis heureux pour vous.
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